Valorisation des ressources de déchets verts broyés du territoire gapençais
L’objectif principal de ce projet est de créer, pour les agriculteurs, des filières locales et durables d’approvisionnement en déchets verts broyés.
Les déchets verts sont issus de la tonte des pelouses, de la taille de haies et d’arbustes, d’élagages, de débroussaillage et autres pratiques similaires.
Ce projet a été créé pour répondre au besoin des agriculteurs d’avoir accès à de nouvelles sources de matières organiques pour leurs sols. Il s’inscrit dans une dynamique régionale où de nombreuses actions sont en train d’essaimer en PACA pour promouvoir une valorisation agricole des déchets verts.
Valoriser les déchets verts issus du territoire est un bon moyen pour les producteurs d’accéder à une source locale de matière organique. Plusieurs utilisations sont possibles : compost, paillage, etc. Bien utilisés, ces apports peuvent avoir de nombreuses actions bénéfiques pour les sols : préserver de l’érosion, améliorer la structure, la rétention d’eau, augmenter le stock de matières organiques, etc.
La récupérations des déchets verts est assumée par les collectivités qui doivent faire face à une augmentation des coûts et des volumes récupérés en déchetteries. La gestion est souvent déléguée à un prestataire, rémunéré pour les enlever et les traiter (broyage, compostage...).
La valorisation des déchets verts à la ferme permet à la collectivité d’avoir une utilisation directe de ces ressources sur son territoire, ce qui offre de nombreux avantages :
L’un des gros challenge du projet était d’être capable d’identifier dans quel cas cette source de matière organique pouvait être pertinente agronomiquement pour les fermes et dans quel cas ce n’était pas le cas. En effet peu de références existent sur le sujet, en particulier dans le contexte pédoclimatique très particulier des Hautes-Alpes.
Une grande quantité d’information peu fiable et peu reproductible a émergé sur le sujet des apports carbonés ces dernières années, avec des retours d’expérience très hétérogène allant de "très bénéfique" à "catastrophique". L’objectif est d’accompagner les agriculteurs intéressés pour limiter tout risque agronomique et d’identifier les facteurs de réussite et d’échec. Le salarié d’Agribio05 Victor Galland, en charge du projet, a pu se former à différentes méthodes d’étude et de diagnostic des sols pour affiner la pertinence de son analyse. Une quinzaines de fermes du territoire leader ont été diagnostiquées sur la durée du projet.
Pour résumer, le pays gapençais se trouve dans un contexte pédo-climatique très particulier, à la transition entre un climat nord provençal et montagnard, chaud et sec en été, froid en hiver, sur des sols majoritairement très calcaires. Ce pédo-climat a pour conséquence de favoriser l’accumulation de matières organiques dans les sols (contrairement à la plupart des sols en France). Ainsi, il a été observé et diagnostiqué que dans un certain nombre de cas l’apport de matière organique carbonée (type déchets verts) était soit peu intéressant, soit présentait un risque agronomique sur les cultures. Plus que pour d’autres types d’apports, les déchets verts doivent être compatibles avec le contexte pédologique de la ferme et du système de cultures en place.
Il est capital que les agriculteurs puisse avoir accès à une formation adéquate de réflexion globale sur leur système et la gestion de leurs matières organiques avant de s’engager vers une utilisation pérenne et viable de ces matières organiques. C’est pourquoi un programme de formation a été monté pour accompagner les agriculteurs sur ces questions. La première session de 2 jours de formations a eu lieu les 28 et 29 mars 2023 et une seconde les 21 et 22 novembre 2023 sur le pays gapençais. En plus de cela, c’est aujourd’hui une vingtaines de journées de formation sur le sujet qui sont dispensées par an sur l’ensemble de la région par le salarié d’Agribio05. Environs 80 producteurs et de porteurs de projets ont été formées en 2023 et 2024, dont une trentaine sur le pays gapençais.
Afin de valoriser et transmettre tout ce recueil de connaissance, le principal livrable du projet est un livret technique à destination des producteurs et conseiller techniques : "utilisation du broyat de déchets verts en agriculture en contexte nord Provence et Hautes-Alpes". Cette documentation technique était inexistante dans la région et servira à une meilleure valorisation agronomique de cette matière organique.
Du point de vu agronomique et technique, le projet a rempli ses objectifs car il aura permis d’identifier les premiers facteurs de réussite ou d’échec de l’utilisation de cette matière en contexte Haut-Alpin.
Des contacts ont été pris avec les quatre intercommunalités du pays gapençais. Malheureusement, cela a surtout permis de mettre en évidence les freins logistiques et organisationnels de la création de ce type de filières.
En effet, les principaux problèmes sont le coût et le matériel nécessaire pour déplacer ces volumes importants. Par exemple, si un agriculteurs souhaite récupérer 100t de déchets verts sur sa ferme, cela représente environs 300m3 à déplacer, ce qui nécessite du matériel lourd et adapté.
La situation est hétérogène sur le territoire mais aucun projet local de valorisation agricole ne s’est structuré avec des collectivités, malgré de premiers résultats intéressants d’initiatives ponctuelles et locales. Dans certaines petites déchetteries, des agriculteurs viennent récupérer le broyat à leur charge mais toujours de façon opportuniste et non contractualisé. Des filières de valorisation locale existent déjà et sont pertinentes sur le territoire (principalement pour du compostage de boues de station) mais ne couvrent qu’une partie de la ressource. Dans d’autres cas, un prestataire est payé pour se débarrasser de la matière qui est en partie livrée sur des fermes (idem, de façon opportuniste et ponctuel entre agriculteurs et le prestataire).
La particularité du territoire, rural, peu peuplé, a pour conséquence la création de nombreux points de collectes, gérant des volumes relativement faible (en comparaison avec des plus grosses collectivités et métropoles dans d’autres département). Par conséquent, on est plus dans une logique de petite filières parallèle de valorisation, plus ou moins gérée, plus ou moins suivi, que dans la nécessité de création d’un filière structurée à plus grosse échelle.
Au final, le projet a permis de soutenir et d’accompagner des initiatives ponctuelles et individuelles, mais n’a malheureusement pas encore permis d’initier de groupes structurés autour d’un approvisionnement pérenne en déchets verts, en particulier avec les collectivités. Le projet a permis de poser les bases pour l’accompagnement de collectivités souhaitant s’investir pour la valorisation agricole de ces déchets verts. Dans tous les cas, les collectivités doivent être au cœur de la dynamique pour la création de ces filières, comme cela est en train d’être le cas sur les collectivités du Sisteronnais-Buech et de Serre-Ponçon, et comme cela va probablement être le cas dans les autres collectivités prochainement.
De plus, l’application de la loi imposant la collecte et la valorisation des biodéchets a totalement changé la donne par rapport à la période du montage du projet. Cela représente un grand bouleversement pour les collectivités qui à la foi complique la gestion de ces matières organiques mais aussi ouvre des possibilités de valorisation d’une matière biodéchets/déchets verts plus intéressante agronomiquement.
Ce projet a permis d’acter que la place et la pertinence d’Agribio05 se situe à partir du moment où la matière organique est présente sur la ferme. Comment l’utiliser, la valoriser pour améliorer son sol, son système, ses productions. Mais notre structure n’est pas pertinente, dans le contexte local actuel, pour structurer des filières d’approvisionnement agricole de déchets verts. Cela doit être une initiative locale de comcom auprès de laquelle Agribio05 peut intervenir en tant qu’expert en soutien.